Souvent réduit à son plus simple appareil, le smartphone, le numérique est un enjeu de taille pour le territoire alsacien et ses nombreuses entreprises, du leader mondial à la TPE. Ce secteur, largement soutenu par l’ADIRA, attire de plus en plus les créateurs de start-ups. L’idée ? Construire le monde de demain.

Difficile de quantifier le nombre d’entreprises liées au numérique en Alsace tant ses formes peuvent être diverses. En 2014, la Chambre de Commerce et d’Industrie Alsace tablait sur 1 800 entreprises et 14 000 emplois, des chiffres qu’on imagine en constante évolution au vu des nombreux dispositifs et espaces déployés sur le territoire pour promouvoir le secteur. En tête, on retrouve la mission de pilotage locale du label FrenchTech, FrenchTech Alsace, emmenée depuis début 2016 par Christophe Parih après un an de travail pour réunir les forces de part et d’autre du territoire. L’élément déclencheur de ce ramdam vivifiant ? L’obtention en juin 2015 du fameux label par MedTech, campus des technologies médicales, à mi-chemin entre la recherche et l’industrie, installé depuis 2012 dans les vastes quartiers de l’hôpital civil à Strasbourg. Ce campus regroupe chirurgiens, ingénieurs, chercheurs et industriels et encourage l’innovation grâce à l’implication de l’IRCAD (Institut de Recherche contre les Cancers de l’Appareil Digestif), du Technoparc ou du PH8, la première pépinière d’entreprises innovantes dédiée aux start-ups des domaines de la santé et des nouvelles technologies. En plus de rassembler des acteurs du privé et du public, le projet a pu bénéficier du label FrenchTech grâce à une candidature portée par le Pôle métropolitain Strasbourg-Mulhouse-Colmar. Des collaborations couronnées de succès, prouvant que le rassemblement des compétences est nécessaire. C’est d’ailleurs dans ce sens qu’a été créé le label FrenchTech. Ainsi, à KMØ, future cité numérique mulhousienne dont l’éclosion a déjà bien été engagée grâce à 6 porteurs de projet (dont Gérald Cohen) réunis autour de Rhénatic, l’on retrouvera aussi des entreprises bas-rhinoises.

Hier, aujourd’hui et demain
KMØ, parlons-en. Cet écosytème a élu pour domicile les bâtiments historiques de la SACM à l’image du Shadok à Strasbourg, implanté dans le Môle Seegmuller. Tout un symbole. Comme si la consolidation du secteur numérique ne pouvait se faire sans le concours de l’histoire. Alexandre Rigaut, responsable du développement Mulhouse – Trois frontières à l’ADIRA le confirme : « Le tissu économique alsacien est fondé sur l’industrie. Le numérique se met justement au service de l’industrie en lui apportant notamment des solutions logistiques et en se structurant physiquement dans des lieux comme KMØ. Ce type de lieu permet d’externaliser des bureaux d’étude, le prototypage ou même les prestations de recherche. Les applications numériques pour l’industrie sont infinies ! » Des liens si logiques qu’on en vient parfois à se demander pourquoi l’explosion de l’économie numérique a pu prendre autant de temps en Alsace. Pour Stéphane Becker, président d’Alsace Digitale « ça dépend de ce qu’on appelle économie numérique ». « Si on en parle comme de la fonction support aux entreprises, son développement ne s’est pas fait plus tard qu’ailleurs. Si on en parle en termes de diffusion informatique et digitale, là on a mis un peu plus de temps et c’est justement peut-être à cause du poids du passé industriel. » Toujours est-il qu’aujourd’hui, nombreux sont les prétendants à la réussite numérique, d’où un nombre exponentiel de start-ups, à tel point qu’on ne dissocie presque plus les termes « numérique » et « start-up ». « C’est dans l’ère du temps, explique Stéphane Becker. Il y a une trame narrative dominante qui veut que la start-up soit associée à des petits jeunes qui monteraient des boîtes pour sauver le monde, alors qu’il y a énormément de quadragénaires qui créent des entreprises dans le numérique. Le terme start-up est un peu galvaudé, il n’y a pas de supériorité à en être une. » En effet, de nombreux jeunes effrayés par un monde de l’entreprise parfois difficile à intégrer voient dans la start-up un moyen d’échapper à la morosité économique. Quitte à y échapper, autant mettre un peu de sens dans ce monde qui reste à construire. Si la mise en avant récurrente de belles success-stories impliquant de jeunes gens n’est pas représentative de la nouvelle économie numérique, elle a le mérite de décomplexer ces nouveaux diplômés qui n’hésitent plus à se lancer. Le rôle de Yasmina Azibi, responsable du développement Eurométropole de Strasbourg à l’ADIRA, est justement d’accompagner ces nombreuses start-ups. Transformeront-elles l’essai ? Rien n’est moins sûr. « L’écueil de ces start-ups du numérique c’est qu’on en voit beaucoup, elles se concurrencent énormément sur les prix mais pas forcément sur les innovations, analyse-t-elle. Elles peuvent faire la différence en se plaçant un peu au devant du marché, en tentant de changer les usages. » La prochaine révolution d’usage reste à venir. En l’attendant, l’Alsace expérimente. « Ce qui manque à la région pour passer une nouvelle étape, c’est justement une success-story qui galvaniserait les foules, diagnostique le président d’Alsace Digitale. On n’est pas plus bête qu’ailleurs ! C’est plus compliqué parce qu’il faut être patient et ne pas tout miser sur un seul cheval. Pour savoir quel arbre va bien pousser, il faut en arroser plusieurs. De toute façon, on ne peut pas déterminer le succès d’une entreprise, cela dépend de bien trop de facteurs qu’on ne maîtrise pas. » À vos pronostics !

FrenchTech
Label attribué aux pôles métropolitains reconnus pour leur capacité d’innovation et leur écosystème de start-ups bénéficiant d’un fonds dédié. Au-delà d’une reconnaissance, c’est aussi un moyen d’encourager les échanges. www.lafrenchtech-alsace.eu

Rhénatic
Pôle numérique d’Alsace, il a pour mission de promouvoir les usages et les bénéfices des technologies numériques auprès des entreprises de la région.
www.rhenatic.eu

Alsace Digitale
Association ayant pour ambition d’animer et de promouvoir la révolution numérique soutenue par l’Eurométropole de Strasbourg. Elle a ouvert en 2012 le premier espace de coworking « La Plage Digitale » et occupe depuis 2015 le deuxième étage du Shadok.
www.alsacedigitale.org

Incubateur
Structure dynamique dédiée aux jeunes entrepreneurs pour augmenter leurs chances de développement.

KMØ et Shadok
Ces deux bâtiments – le premier à Mulhouse, en plein chantier, le second à Strasbourg – sont les totems de la FrenchTech Alsace. KMØ regroupera incubateur de start-ups, entreprises, formations liées au numérique, espaces de coworking et technologies permettant le développement de produits innovants. Le Shadok, « lieu-outil » inauguré en avril 2015, est une vitrine pour les entrepreneurs et créatifs dont elle favorise la rencontre, le partage et l’émergence de nouvelles pratiques artistiques liées au numérique.
www.km0.info  http://www.shadok.strasbourg.eu%20

Startup weekend
Mouvement mondial d’entrepreneurs actifs et confirmés transmettant les bases de la création d’entreprise au start-upeurs. Ces événements – en Alsace, ils ont lieu à Strasbourg ou Mulhouse – suivent le même principe : les entrepreneurs en herbe présentent leur projet et bénéficient de l’avis des autres participants, départagés ensuite par un vote qui débouche sur un accompagnement pour accélérer le développement de la start-up, le tout en 54 heures !

Ligne numérique
Branche d’e-nov campus niché à l’Université de Haute-Alsace à Mulhouse, Ligne Numérique est un programme lancé en 2015 avec pour objectif d’aider des jeunes sortis du système scolaire à acquérir de nouvelles compétences dans le domaine numérique. En février dernier, Ligne Numérique a été labellisée Grande école du numérique. www.enovcampus.eu

Le numérique dans le Haut-Rhin
« Il est lumineux, visionnaire et étonnant : à 50 ans, il connaît mieux que moi le monde du nu-mérique ! » Terence Figueiredo, 27 ans, l’un des participants au programme e-nov campus, ne ta¬rit pas d’éloges sur le grand manitou de ces lieux. L’homme en question est un « prof » comme on n’en fait (presque) plus : il aime « prendre des leçons » de ces jeunes qu’il accompagne, avance et pense avec l’innovation en intraveineuse. « Pour moi, on innove dès qu’on remet en cause quelque chose, un artiste innove nécessaire¬ment. Une entreprise, elle, survit parce qu’elle est obligée de remettre en question ses sché¬mas. » Dans un monde mouvant, diagnostiqué par les observateurs comme en révolution, les modes de pensées des entreprises sont voués à être profondément modifiés. « La question est de savoir à quelle vitesse ils changeront », se demande Gérald Cohen, qui tente depuis long¬temps de poser les jalons de ce changement. En 2011, quand le numérique n’était pas encore automatique, en tout cas en Alsace, il monte e-nov campus, « le garage de la Silicon Valley », un pré-incubateur d’entreprises connectées au digital, en réponse aux envies d’entreprenariat formulées par les étudiants. « On répond tou¬jours aux besoins, qu’ils proviennent de n’importe quel acteur, explique-t-il. L’idée de ce nouveau campus était surtout de mettre tout le monde en réseau pour développer un accompagnement qui fasse sens. L’association regroupe ainsi l’université, des chefs d’entreprises et quelques institutionnels. » Cette pluridisciplinarité est pour Gérald Cohen une seconde nature, il en faisait déjà l’éloge lors d’une passionnante conférence TEDx. « Des gars comme moi n’ont rien à perdre à couper les fils et exploser certains murs. Aujourd’hui, on ne peut, par exemple, plus modéliser des visages sans mêler informatique et théâtre. » Cette culture de l’ouverture, e-nov campus continuera à la porter en tant qu’opé¬rateur de KMØ, l’écosystème numérique qui prendra forme dès la fin de l’année à quelques mètres du campus Fonderie. Le rêve de Gérald Cohen ? « Emmener mes étudiants à voyager dans le temps avec des lunettes ou autre chose : aller discuter avec Einstein ou Picasso. Une sorte d’intelligence reconstituée. » Un voyage auquel on participerait volontiers.
— e-nov campus 16, rue de la Fonderie | Mulhouse www.enovcampus.eu

Blueboat
Comment est née Blueboat ?
Il y a 11 ans, il n’était pas question d’e-reputation, on parlait de veille e-marketing. On s’est rendus compte que le Web participait de l’intelligence économique : collecte d’informations sur de potentiels clients, analyse de la concurrence, communication, etc. L’e-reputation arrive en 2007-2008 en même temps que les réseaux sociaux. Là, Blueboat se dit que les entreprises n’auront pas le savoir-faire pour détecter ce qui se dit d’eux sur le Web, c’est un service qu’on propose avec, aujourd’hui, la création de blogs, l’animation de pages Facebook ou une présence dans les forums de discussion. Nos clients sont notamment Bubendorff, Internorm, Schmidt Groupe, Hager ou la ville de Mulhouse.
Est-ce que l’expression start-up existait déjà à l’époque ?
Nous sommes la preuve qu’une start-up en Alsace, ça peut durer 11 ans ! Je pense que c’est plus un terme qu’autre chose. On devient start-up à partir du moment où on est sur le Web. C’est bien, ça signifie qu’on est toujours jeunes [Rires].
— 3, boulevard de l’Europe | Mulhouse www.blueboat.fr

Le numérique dans le Bas-Rhin
En passant la porte de New Web et Synovo, deux entreprises créées par Jérémy Wies et implan-tées au Parc Phoenix à Strasbourg, l’« esprit start-up » vient nous frapper de plein fouet. Les 40 salariés – 25 ans en moyenne – ont les yeux rivés sur leurs écrans. Les discussions s’improvisent sur un coin de bureau, quand les cafés s’amoncellent. À 26 ans, Jérémy Wies, chef d’entreprise en jean-polo, est à la tête de deux entreprises en pleine explosion. Tout a commen¬cé alors qu’il était encore étudiant à Supinfo à Strasbourg. En plein stage dans une entreprise suisse, il s’ennuie ferme. « J’ai décidé de me mettre à mon compte, ainsi, si je m’ennuyais, ce serait ma faute. J’ai commencé ma boîte en créant un site Internet où je proposais mes services de dépanneur en informatique. » Son premier client ? Son grand-père. Très vite, les clients affluent et l’étudiant se voit contraint de prendre un bureau, en parallèle de ses études. « Un jour, c’était un 24 décembre au soir, je suis allé dépanner un voisin à Mulhouse. Je suis resté 12 heures et n’ai rien réussi à réparer. Ça lui a bien plu que je me déplace le soir de Noël. Il se trouve que c’était le plus gros ambulancier de France. » Bouche-à-oreille oblige, d’autres ambulanciers le sollicitent. New Web, entreprise de cloud computing et data center était née. « J’ai réalisé que le logiciel des ambulanciers n’était pas adapté. En assistant à une réunion nationale, j’ai compris qu’ils avaient besoin d’autre chose. » Lors d’un Startup weekend, Jérémy et deux amis présentent « sur un coup de tête » leur idée d’un logiciel pour les ambulanciers – gestion client, régulation de la flotte, prise de rendez-vous, cartographie, facturation, tout est optimisé. « On a créé la société en 2013, on s’est associé et on a fait une levée de fonds. » 15 mois plus tard, Synovo compte 30 salariés ! En 2014, Jérémy Wies est couronné par le prix Talent des Cités : les retombées presse sont énormes. « Tout le monde voulait travailler avec nous, mais on n’était pas prêts ! » Du jour au lendemain, l’informaticien se retrouve à gérer son image. C’est d’ailleurs cette adaptation constante qui fait un bon start-upeur : « Il faut être tout en même temps : commercial, gestionnaire, responsable des ressources humaines… » Une recette qui aura permis de multiplier la croissance de ses entreprises par 10 en quatre ans…
— Synovo + New Web 8, rue Schertz | Strasbourg www.synovo.fr www.new-web.fr

3D-ATS
Carte d’identité
3D-ATS, start-up créée en 2014 par Leonard Ciubotaru, développe un outil à destination des TPE/ PME qui permet l’animation d’un objet ou d’une machine en 3D et en couleur pour lever le voile sur son fonctionnement. L’idée ? Utiliser l’animation comme support de communication pour présenter un produit particulier ou comme support technique pour l’utiliser comme un mode d’emploi très didactique qui se met à jour automatiquement.

Développement
« Ça prend du temps de pénétrer le marché. Entre le moment où les potentiels clients découvrent 3D-ATS et le moment où ils prennent une décision peut s’écouler plusieurs mois. Après un processus intensif de démarchage – j’ai failli me décourager – je commence à avoir des clients, de plus en plus étonnants. »
Pour le moment, Leonard Ciubotaru est seul. Il prévoit d’investir et notamment d’embaucher ou de trouver
un partenaire chargé de l’aspect commercial.
www.3d-ats.com

Fivory
Lancée à Strasbourg en mai dernier, l’application Fivory permet de régler ses achats avec un smartphone et distille avantages fidélité et actus des boutiques qui adoptent cette technologie. Développé par le Crédit Mutuel, ce mobile wallet concilie paiement mobile et une sorte de réseau social dédié au shopping. Les commerçants envoient directement leurs offres sur l’app, donc à leurs clients potentiels qui ont ainsi accès à une myriade de boutiques géolocalisées, aux programmes de fidélité et à un moyen de paiement sans contact. Comme si la carte bleue était intégrée au téléphone, les informations étant protégées par un code d’accès. Fivory a par ailleurs créé un blog qui permet « d’éditorialiser » les news des commerçants équipés. Plus de 400 points de vente ont adopté Fivory : alimentation, bars, restaurants, services de proximité, sport, bien-être, mode, tout y est.
http://www.fivory.com (Application iOS / Android)

Texte : Cécile Becker
Illustrations : Laurène Boglio
Photos : Christophe Urbain


 Cet article est extrait du magazine hors-série ADIRA-ZUT ! 2016 dédié à l’attractivité économique de l’Alsace.

 

 

 


 

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